Députée d'Indre-et-Loire
Membre de la commission Affaires étrangères
Membre de la commission des Affaires européennes
Catégories : Commission des Affaires Européennes
Le 14 et 15 décembre, les chefs d’État et de gouvernement se sont réunis à Bruxelles pour un Conseil européen. La secrétaire d’État chargée des affaires européennes, Laurence Boone, nous informe aujourd’hui sur les résultats de cette réunion.
Les dirigeants des 27 États membres se sont réunis pour la dernière fois pendant le semestre de présidence espagnole du Conseil. Les discussions ont abordé des sujets d’une importance historique, notamment le soutien à l’Ukraine et la question de l’élargissement et des réformes internes de l’UE, la révision à mi-parcours du cadre financier pluriannuel, le conflit en cours au Proche-Orient, ainsi que les enjeux de sécurité et de défense européennes dans ce contexte complexe. D’autres points à l’ordre du jour ont inclus une discussion stratégique sur les migrations et la condamnation de leur instrumentalisation, la COP28, et la lutte contre les discours de haine.
Ouverture des négociations d’adhésion et la question de l’aide financière et militaire à l’Ukraine
L’Ukraine a été au cœur des discussions, avec deux dossiers clés sur la table : l’ouverture de négociations d’adhésion à l’Union européenne et la question de l’aide militaire et l’aide financière de 50 milliards d’euros pour le pays.
La guerre en Ukraine a remis au premier plan la question de l’élargissement de l’Union européenne. Le feu vert a été donné pour ouvrir les négociations d’adhésion avec l’Ukraine et la Moldavie et accorder le statut de candidat à l’UE à la Géorgie. Les États membres se sont aussi engagés à accélérer le processus d’adhésion des Balkans occidentaux. Le processus d’adhésion à l’UE implique que les candidats remplissent les critères requis, négocient des chapitres de l’acquis communautaire et obtiennent l’approbation unanime des États membres pour devenir membres à part entière de l’Union européenne.
Désormais, dix pays frappent à la porte de l’UE. Ces perspectives d’élargissement posent des questions quant à la capacité de l’UE à intégrer de nouveaux membres et relancent le débat sur l’approfondissement de l’UE. Faut-il envisager un approfondissement, impliquant une réforme des institutions et des politiques de l’Union européenne, avant d’envisager l’intégration de nouveaux membres ? Le Conseil européen prévoit de mettre en place une feuille de route sur ce sujet d’ici l’été 2024. Sur la réforme du processus d’élargissement, un excellent rapport d’information a été fait par Monsieur Jean-Louis Bourlanges (disponible ici).
Pourtant très attendu, les États membres n’ont pas été en mesure d’approuver l’octroi à ce pays d’une aide de 50 milliards d’euros sur la période 2024-2027 (33 milliards d’euros de prêts et 17 milliards de subventions non remboursables) en raison de l’opposition de la Hongrie. Depuis 2022, l’Union européenne et ses États membres ont versé plus de 82 milliards d’euros à Kiev, selon le Conseil de l’UE. Toutefois, face à un conflit persistant, l’Ukraine a un besoin pressant de fonds de la part de ses partenaires, d’autant plus que le soutien des États-Unis, un autre allié clé, pourrait être compromis. Bien que la portée symbolique d’un désaccord européen soit notable, l’Union aurait la possibilité de contourner le veto hongrois en optant pour un accord intergouvernemental, permettant à chaque État de mettre en place son propre programme d’aide bilatérale, dont la somme pourrait atteindre le montant prévu.
Sur la défense européenne, le Conseil européen a appelé le Haut représentant, la Commission européenne et l’Agence européenne de défense à mettre en place une véritable base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE).
Mes préoccupations
Face à ces dissensions, il m’a paru important de souligner deux préoccupations à la Secrétaire d’État Laurence Boone. Tout d’abord, bien que le Conseil européen a réaffirmé le soutien financier et militaire à l’Ukraine, des doutes commencent à émerger sur ce soutien, notamment en Hongrie et en Slovaquie. Plus préoccupant, la présidente de la commission de la défense au Bundestag a récemment déclaré que l’aide financière de la France vers l’Ukraine serait dérisoire par rapport à celle de l’Allemagne.
J’ai aussi insisté sur l’appel du Conseil européen à mettre en place une véritable base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE). Nous avons toujours 20 modèles de chars différents, et 17 s’agissant des modèles d’avions. Une synergie pourrait non seulement engendrer une économie entre 24,5 et 75 milliards d’euros, mais aussi moins mettre nos industries en concurrence les unes avec les autres. Les outils qu’on met en place restent relativement faibles par rapport aux besoins.
La Secrétaire d’État Laurence Boone m’a répondu que le soutien à l’Ukraine est la priorité de tous les membres de l’UE, hormis la Hongrie et la République slovaque. Sur l’aide financière, elle a rappelé que la France est le deuxième contributeur au budget de la Facilité européenne pour la paix, qui permet de fournir les armements à Kiev. La France a contribué à hauteur de 1,2 milliards d’euros, soit 18% du budget total de 6,5 milliards d’euros. Sur 30 000 soldats ukrainiens formés par la mission militaire de l’UE, la France en a formé 5 000. De plus, la France a été le moteur dans la création des instruments européens qui permettront de renforcer nos industries de défense, notamment en matière de préférence européenne et d’accentuation de l’importance de l’interopérabilité.